Atelier du 17 décembre 2015
Re-Naissance, nouvelle vie, nouvelle année...
Les piafs du soir étaient Gaianee, A-Nako, Mikage, Broyeur, Pierrot et Rena.
Comme la majorité boudait Noël, Mikage a eu la présence d'esprit de proposer quelque chose qui serait quand même dans le thème de cette fin d'année : le re-nouveau. De plus tout le monde devait choisir un personnage, un défaut et une qualité de ce personnage, un lieu et une date. Chaque consigne a été donnée à un autre, histoire de rendre tout ça encore plus passionnant !
Réincarnation - Texte de Gaianee
D'après une idée de Rena
Personnage : Vieil homme / Défaut: / Qualité : / Lieu: Désert / Epoque: préhistoire
Le serpent cracha, dressé dans toute sa dangerosité face à l’animal imprudent qui avait osé le défier. L’homme ne broncha pas, les mains levées, ses yeux noirs perçant fixés sur le reptile menaçant. Celui-ci feula à nouveau, ses crochets pointus et luisants d’un venin mortel prêts à se planter dans la peau parcheminée de l’homme. Lentement, délicatement, les mains ridées du vieillard s’agitèrent, dessinant de gracieuses arabesques dans les airs. A aucun moment son regard ne se détourna de la bête. Le serpent, bien que toujours en position offensive, sembla légèrement se calmer. Sa gueule se referma tandis que ses pupilles dépourvues de paupières suivaient attentivement les mouvements de l’homme, son long cœur écailleux se balançant même à leur rythme.
Puis soudain, d’un geste vif, l’animal fut saisit à la tête et immobilisé, gueule ouverte.
Le vieillard esquissa un rictus satisfait. Bien, parfait.
Sans se presser, l’homme glissa une main dans la sacoche en cuir qui enserrait sa taille. Il en retira une petite coupelle de terre cuite aux bords morcelés. Là, il vint y appuyer la tête du serpent, crochets en avant. Son pouce pressa le crâne minuscule entre les deux yeux écarquillés du reptile. Bientôt, le poison jaillit, inondant le récipient par grosses gouttes.
Lorsqu’il estima en avoir assez, il brisa la nuque de l’animal d’un geste sec. Le craquement fut à peine perceptible.
Abandonnant sur le sable brûlant le cadavre à peine expirant, l’homme se redressa, faisant grincer ses articulations fragiles. Il tenait enfin son salut. Elle était là sa mort, belle et rapide, et lui seul avait le pouvoir de décider le moment où il la ferait intervenir.
Son peuple avait cru que l’exiler dans le désert lui infligerait une longue et douloureuse agonie. Il se trompait. Il avait été leur chaman, leur guérisseur, leur prêtre. Comment avait-il pu croire qu’il le mettrait à genoux ?
« Arakalë, distri bör non têk… » marmonna le déchu en levant la coupelle vers le ciel et le soleil ardent.
Il répéta son incantation deux fois, avant de porter le liquide mortel à ses lèvres. Il était serein, il n’avait pas peur. Son esprit était prêt, il était prêt.
Il ne mit pas longtemps à mourir. Le venin fit rapidement effet, s’attaquant à son organisme, son cœur, le faisant convulser. Il expira au sol, les bras en croix, un rictus mauvais étirant ses lèvres en une grimace malsaine tandis que ses yeux noirs se figeaient, toute trace de vie l’ayant déserté.
Il quitta son enveloppe physique désormais pourrissante. Filant, invisible, à travers le temps et l’espace, il ne tarda pas à trouver ce qu’il cherchait. Son village lui apparut, misérable et minuscule. Il ne s’attarda pas auprès des femmes et des hommes qui l’arpentaient, insouciants et oublieux de ce qu’ils lui avaient fait subir. Son âme fila tout droit vers une habitation, large tente en peau de bête qu’il traversa comme si elle n’était rien. Sa cible se trouvait à l’intérieur. Sans aucune hésitation, il plongea dans le ventre arrondi d’une jeune femme occupée à coudre une paire de mocassins. Sans hésitation, toujours, il vint écraser l’embryon d’âme du nourrisson qui grandissait en elle pour prendre sa place.
La femme se figea soudainement, les yeux écarquillés. Un hoquet. Elle porta la main à son ventre. Une douleur sourde. Un liquide chaud entre ses jambes. Elle hurla.
Son cri fut entendu. Un homme pénétra dans la tente, affolé. Voyant la jeune femme écroulée au sol, il se figea un instant, avant d’appeler de l’aide. Celle-ci ne tarda pas.
La nouvelle chamane se présenta rapidement et donna des ordres aux diverses personnes présentes dans la pièce. La future mère gémissait, assommée par la douleur. Mais la guérisseuse connaissait son affaire. L’accouchement fut long mais bien mené.
A sa naissance, le bébé ne cria pas. Visqueux et sanguinolent, il souriait au contraire d’un air extatique.
Il avait réussi. Il tiendrait sa revanche. Tout n’était désormais qu’une question de patience
Puis soudain, d’un geste vif, l’animal fut saisit à la tête et immobilisé, gueule ouverte.
Le vieillard esquissa un rictus satisfait. Bien, parfait.
Sans se presser, l’homme glissa une main dans la sacoche en cuir qui enserrait sa taille. Il en retira une petite coupelle de terre cuite aux bords morcelés. Là, il vint y appuyer la tête du serpent, crochets en avant. Son pouce pressa le crâne minuscule entre les deux yeux écarquillés du reptile. Bientôt, le poison jaillit, inondant le récipient par grosses gouttes.
Lorsqu’il estima en avoir assez, il brisa la nuque de l’animal d’un geste sec. Le craquement fut à peine perceptible.
Abandonnant sur le sable brûlant le cadavre à peine expirant, l’homme se redressa, faisant grincer ses articulations fragiles. Il tenait enfin son salut. Elle était là sa mort, belle et rapide, et lui seul avait le pouvoir de décider le moment où il la ferait intervenir.
Son peuple avait cru que l’exiler dans le désert lui infligerait une longue et douloureuse agonie. Il se trompait. Il avait été leur chaman, leur guérisseur, leur prêtre. Comment avait-il pu croire qu’il le mettrait à genoux ?
« Arakalë, distri bör non têk… » marmonna le déchu en levant la coupelle vers le ciel et le soleil ardent.
Il répéta son incantation deux fois, avant de porter le liquide mortel à ses lèvres. Il était serein, il n’avait pas peur. Son esprit était prêt, il était prêt.
Il ne mit pas longtemps à mourir. Le venin fit rapidement effet, s’attaquant à son organisme, son cœur, le faisant convulser. Il expira au sol, les bras en croix, un rictus mauvais étirant ses lèvres en une grimace malsaine tandis que ses yeux noirs se figeaient, toute trace de vie l’ayant déserté.
Il quitta son enveloppe physique désormais pourrissante. Filant, invisible, à travers le temps et l’espace, il ne tarda pas à trouver ce qu’il cherchait. Son village lui apparut, misérable et minuscule. Il ne s’attarda pas auprès des femmes et des hommes qui l’arpentaient, insouciants et oublieux de ce qu’ils lui avaient fait subir. Son âme fila tout droit vers une habitation, large tente en peau de bête qu’il traversa comme si elle n’était rien. Sa cible se trouvait à l’intérieur. Sans aucune hésitation, il plongea dans le ventre arrondi d’une jeune femme occupée à coudre une paire de mocassins. Sans hésitation, toujours, il vint écraser l’embryon d’âme du nourrisson qui grandissait en elle pour prendre sa place.
La femme se figea soudainement, les yeux écarquillés. Un hoquet. Elle porta la main à son ventre. Une douleur sourde. Un liquide chaud entre ses jambes. Elle hurla.
Son cri fut entendu. Un homme pénétra dans la tente, affolé. Voyant la jeune femme écroulée au sol, il se figea un instant, avant d’appeler de l’aide. Celle-ci ne tarda pas.
La nouvelle chamane se présenta rapidement et donna des ordres aux diverses personnes présentes dans la pièce. La future mère gémissait, assommée par la douleur. Mais la guérisseuse connaissait son affaire. L’accouchement fut long mais bien mené.
A sa naissance, le bébé ne cria pas. Visqueux et sanguinolent, il souriait au contraire d’un air extatique.
Il avait réussi. Il tiendrait sa revanche. Tout n’était désormais qu’une question de patience
La promesse du renouveau - Texte de Mikage
D'après une idée de Gaïanee
Personnage : Humain / Défaut: la luxure / Lieu: un manoir / Epoque: fin XIX/début XX
(musique écoutée pendant l'écriture: https://www.youtube.com/watch?v=p8TkBM5DeHM https://www.youtube.com/watch?v=0FdNlhZAYBE )
Première partie
Le manoir des Blackwells sommeillait. Au coin du feux, un homme feuilletait d'un air détacher un roman emprunté de la bibliothèque. Les flammes avides léchaient les buches en émettant des craquements étouffés.
Un verre de vin était négligemment poser sur la table basse. De temps a autre l'homme tendait la main, s'emparait du verre, avalait une gorgée du liquide sirupeux puis s'en retournait a sa lecture.
Rien ne semblait troubler l'apparente quiétude de la demeure. Au dehors, le vent geler paraissait risible a s'essouffler ainsi.
Les heures s'égrainait, tout semblait figée dans une éternelle continuité, dans une routine calibrée. Même la vielle horloge à balancier refusait de marquer une seconde d'hésitation dans sa mécanique bien huilée. Son tic tac était rassurant, familier et tellement prévisible. Chaque seconde durant une seconde, chaque tic enchainant un tac, chaque roue en entrainant une autre...
Sur le cousin, au coin de la pièce, Edwin, le bas-rouge du domaine ronflait paresseusement.
Le molosse ouvrit un œil, comme si son instinct lui révélait un secret que les hommes ne peuvent entrevoir. Une infime variation, un changement imperceptible. Il émit un grognement roque.
"Edwin...tiens toi tranquille..." murmura l'homme d'un ton las.
L'animal jeta un œil réprobateur a son maitre et tenta de se rendormir.
Deuxième partie
Un petit son, un cliquetis annonciateur retenti. L'horloge sonna un premier coup. Chaque glas résonnait un peu plus dans le silence de la pièce. Enfin, le douzième coup retenti ne laissant que le silence derrière lui.
En ce premier jour de l'An de grâce 1901, l'hivers recouvrait l'Angleterre d'un tapis de neige fraiche. La nuit s'étendait et la bise jouait dans les ramures des vieux chênes du parc. La nature, fidèle a elle-même, attendait le premier rayons printanier pour offrir au monde la promesse du renouveau...
Troisième partie
L'homme posa son livre sur la tablette et s'étira. Le nouvel an était passé. Il se dirigea vers la cheminée. Il ouvrit un petit coffret et en sorti un pipe qu'il bourra de tabac odorant. Portant la pipe a ses lèvres, il craqua une allumette et souffleta pour attiser la braise.
Il se tourna vers la fenêtre, s'avança, et tria les rideaux.
Edwin releva le museau en observant son maitre.
"Bien mon cher...si nous allions dormir? Nous apprendrons bien assez tôt ce que nous réserve le monde en ce nouveau siècle."
L'homme quitta la pièce suivie par son compagnons fidèle.
Le braise rougeoyait encore dans l'âtre. Le balancier de l'horloge marquait la cadence. Le rideau de la fenêtre eu un petit frison, imperceptible, comme si le vent du dehors s'était permis d'entrer, comme si l'ombre de la nuit s'était glissée un instant dans la vielle demeure.
"Chose inanimée? Avez-vous donc une âme?"
C'était là les dernières lignes inscrites sur la page laissée à l'abandon, dans le manoir des Blackwells en cet an de grâce 1901.
Le manoir des Blackwells sommeillait. Au coin du feux, un homme feuilletait d'un air détacher un roman emprunté de la bibliothèque. Les flammes avides léchaient les buches en émettant des craquements étouffés.
Un verre de vin était négligemment poser sur la table basse. De temps a autre l'homme tendait la main, s'emparait du verre, avalait une gorgée du liquide sirupeux puis s'en retournait a sa lecture.
Rien ne semblait troubler l'apparente quiétude de la demeure. Au dehors, le vent geler paraissait risible a s'essouffler ainsi.
Les heures s'égrainait, tout semblait figée dans une éternelle continuité, dans une routine calibrée. Même la vielle horloge à balancier refusait de marquer une seconde d'hésitation dans sa mécanique bien huilée. Son tic tac était rassurant, familier et tellement prévisible. Chaque seconde durant une seconde, chaque tic enchainant un tac, chaque roue en entrainant une autre...
Sur le cousin, au coin de la pièce, Edwin, le bas-rouge du domaine ronflait paresseusement.
Le molosse ouvrit un œil, comme si son instinct lui révélait un secret que les hommes ne peuvent entrevoir. Une infime variation, un changement imperceptible. Il émit un grognement roque.
"Edwin...tiens toi tranquille..." murmura l'homme d'un ton las.
L'animal jeta un œil réprobateur a son maitre et tenta de se rendormir.
Deuxième partie
Un petit son, un cliquetis annonciateur retenti. L'horloge sonna un premier coup. Chaque glas résonnait un peu plus dans le silence de la pièce. Enfin, le douzième coup retenti ne laissant que le silence derrière lui.
En ce premier jour de l'An de grâce 1901, l'hivers recouvrait l'Angleterre d'un tapis de neige fraiche. La nuit s'étendait et la bise jouait dans les ramures des vieux chênes du parc. La nature, fidèle a elle-même, attendait le premier rayons printanier pour offrir au monde la promesse du renouveau...
Troisième partie
L'homme posa son livre sur la tablette et s'étira. Le nouvel an était passé. Il se dirigea vers la cheminée. Il ouvrit un petit coffret et en sorti un pipe qu'il bourra de tabac odorant. Portant la pipe a ses lèvres, il craqua une allumette et souffleta pour attiser la braise.
Il se tourna vers la fenêtre, s'avança, et tria les rideaux.
Edwin releva le museau en observant son maitre.
"Bien mon cher...si nous allions dormir? Nous apprendrons bien assez tôt ce que nous réserve le monde en ce nouveau siècle."
L'homme quitta la pièce suivie par son compagnons fidèle.
Le braise rougeoyait encore dans l'âtre. Le balancier de l'horloge marquait la cadence. Le rideau de la fenêtre eu un petit frison, imperceptible, comme si le vent du dehors s'était permis d'entrer, comme si l'ombre de la nuit s'était glissée un instant dans la vielle demeure.
"Chose inanimée? Avez-vous donc une âme?"
C'était là les dernières lignes inscrites sur la page laissée à l'abandon, dans le manoir des Blackwells en cet an de grâce 1901.
Renaissance du barde - Texte de Pierro
D'après une idée de Mikage
Personnage : nain barde / Défaut: trop curieux / Qualité : affable / Lieu: taverne / Epoque:médiévale
Approchez et dansez, fiers et gents damoiseaux,
Voici que vient se mêler au chant des oiseaux
Cette histoire qu’ici je viens vous raconter,
Trouvez vos cavalières, approchez, écoutez :
Il était une fois, vivant près du château,
Un minuscule barde aux allures de sot ;
Sot il ne l’était point, ou il ne l’était guère,
Il flânait, il rêvait, fier, à la nuit tombée,
Laissant les courtisans et les belles bouche bée.
Son verbe était si fin, du moins m’en a-t-on dit,
Qu’en l’écoutant, l’on s’eût bien cru au paradis ;
Et il aimait parler tant qu’il aimait chanter,
Alors il conversait de sa voix enchantée ;
Seulement, voilà tout, s’il avait un défaut,
C’est qu’il ne s’arrêtait de parler de sitôt !
Or, quand vous discutez, et quand vous questionnez,
Sachez-le, l’indiscret est très vite arrivé.
Alors, l’on s’indignait du barde sans manière,
Et le pauvre poëte était bien solitaire.
Ce tendre ménestrel, par un soir de chagrin,
Vint voir le tavernier, quelques sous à la main,
Pour noyer tous ses pleurs dans un peu d’eau-de-vie ;
Il se tint au comptoir, mais quand il fut servi...
Une dame approcha, son, ce fut une fille,
S’accouda près de lui, se présenta : « Camille »,
Et lui dit : « Cher ami, que faites-vous ici ?
» Au salon de la cour, je vous croyais assis. »
Le pauvre troubadour, finissant sa gorgée,
Répondit : « De la cour, je me suis fait chasser.
» Hier, un fâcheux marquis, un ami du seigneur,
» Lâchement m’a déchu dans un froid déshonneur
» Car, après avoir chanté mes vers et mes trilles,
» Je causais calmement avec sa jeune fille. »
Camille, à ce moment, saisissant l’occasion,
Glissa tendrement son bras autour du garçon :
« Vois-tu, je n’ai que faire des seigneurs, des honneurs,
» Dans ma vie, je ne cherche qu’un peu de bonheur.
» Alors viens avec moi, partons dès à présent,
» Car nous n’avons que faire de tous ces médisants. »
Le barde, ce jour-là, recommença sa vie
Qu’il avait gâché en criant sur le parvis.
L’on ne les revit plus, mais je sais par les vents,
Qu’ils vivent de bonheur, aimant et écrivant.
Voici que vient se mêler au chant des oiseaux
Cette histoire qu’ici je viens vous raconter,
Trouvez vos cavalières, approchez, écoutez :
Il était une fois, vivant près du château,
Un minuscule barde aux allures de sot ;
Sot il ne l’était point, ou il ne l’était guère,
Il flânait, il rêvait, fier, à la nuit tombée,
Laissant les courtisans et les belles bouche bée.
Son verbe était si fin, du moins m’en a-t-on dit,
Qu’en l’écoutant, l’on s’eût bien cru au paradis ;
Et il aimait parler tant qu’il aimait chanter,
Alors il conversait de sa voix enchantée ;
Seulement, voilà tout, s’il avait un défaut,
C’est qu’il ne s’arrêtait de parler de sitôt !
Or, quand vous discutez, et quand vous questionnez,
Sachez-le, l’indiscret est très vite arrivé.
Alors, l’on s’indignait du barde sans manière,
Et le pauvre poëte était bien solitaire.
Ce tendre ménestrel, par un soir de chagrin,
Vint voir le tavernier, quelques sous à la main,
Pour noyer tous ses pleurs dans un peu d’eau-de-vie ;
Il se tint au comptoir, mais quand il fut servi...
Une dame approcha, son, ce fut une fille,
S’accouda près de lui, se présenta : « Camille »,
Et lui dit : « Cher ami, que faites-vous ici ?
» Au salon de la cour, je vous croyais assis. »
Le pauvre troubadour, finissant sa gorgée,
Répondit : « De la cour, je me suis fait chasser.
» Hier, un fâcheux marquis, un ami du seigneur,
» Lâchement m’a déchu dans un froid déshonneur
» Car, après avoir chanté mes vers et mes trilles,
» Je causais calmement avec sa jeune fille. »
Camille, à ce moment, saisissant l’occasion,
Glissa tendrement son bras autour du garçon :
« Vois-tu, je n’ai que faire des seigneurs, des honneurs,
» Dans ma vie, je ne cherche qu’un peu de bonheur.
» Alors viens avec moi, partons dès à présent,
» Car nous n’avons que faire de tous ces médisants. »
Le barde, ce jour-là, recommença sa vie
Qu’il avait gâché en criant sur le parvis.
L’on ne les revit plus, mais je sais par les vents,
Qu’ils vivent de bonheur, aimant et écrivant.
Texte de Broyeur
D'après une idée de Pierro
Personnage : Enfant / Défaut: Solitaire / Qualité : Intelligent / Lieu: Paris / Epoque: Comtemporaine
Il ne se lassait pas de ses soldats de plomb
Là où les autres gars, simplets et volubiles,
Pouvaient durant des jours, de gestes malhabiles
Prétendre s’amuser à poursuivre un ballon.
Sous les toits le temps passe au rythme des tromblons.
Les avenues sont vides en la ruche immobile,
Mais on défend encore un tas de fer débile.
Rien n’étonne plus Bill, qui trouve le temps long.
Ses figurines avancent au son des brigadiers.
Sur l’écran, par à-coups, quelques images filent :
Des balles dans lesquelles on ne tape du pied.
Petit Bill, apaisé, sous la coupe des bombes,
Rêve déjà du jour où l’on creuse sa tombe.
Devant ses yeux, au pas, les escouades défilent.
Là où les autres gars, simplets et volubiles,
Pouvaient durant des jours, de gestes malhabiles
Prétendre s’amuser à poursuivre un ballon.
Sous les toits le temps passe au rythme des tromblons.
Les avenues sont vides en la ruche immobile,
Mais on défend encore un tas de fer débile.
Rien n’étonne plus Bill, qui trouve le temps long.
Ses figurines avancent au son des brigadiers.
Sur l’écran, par à-coups, quelques images filent :
Des balles dans lesquelles on ne tape du pied.
Petit Bill, apaisé, sous la coupe des bombes,
Rêve déjà du jour où l’on creuse sa tombe.
Devant ses yeux, au pas, les escouades défilent.
Texte d'Anako
D'après une idée de Broyeur
Personnage : Un prince en exil / Défaut: Orgueuilleux / Qualité : Méthodique / Lieu: La planète où il est fugiti/ Epoque: Le futur
L’hoverboard venait de s’écraser dans un des champs minier de Larium. L’air empestait, étouffant, s’attaquant directement aux poumons. Dans un râle, je toussais avant de finir par vomir dans un coin comme une simple vermine. Par chance, aucune présence, vu l’alignement des trois soleils, l’heure du repas à n’ne point douter.
D’un revers de manche, j’essuyais mon visage trempé de sueur. En plus de l’odeur, l’atmosphère même était lourde et oppressante. Saloperie de cambrousse ! Saloperie de machine ! Et surtout…
« Saloperie de vieux fou ! » beuglais-je comme seul au monde avant de me reprendre en pestant un coup.
L’hoverboard hors d’état, je me devais de me sortir de ce pétrin, d’éviter ces pauvres sous-évolués. Rien que les savoir si proche de moi me filait la nausée. A moins que ça ne soit l’ambiance de la mine. Le roulement, ce tintement régulier qui vrillait vos nerfs. Avant de m’écrouler, je pris à droite au premier croisement que je trouvais.
Un point de repère, je me devais d’en trouver un.
Une fois trouvé, ça ne devait pas bien être compliqué de se diriger, après tout j’avais déjà étudié diverses cartes concernant des champs de plébéiens, ça ne devait guère en déroger.
Pensais-je.
J’eus beau me diriger suivant les plans dont je me souvenais, je tournais inlassablement en rond. Ou plutôt, je me m’étais perdu comme dans un véritable labyrinthe, les marques que je m’étais laissé, complètement disparues de mon champ de vision.
Et ce roulement, léger, précis, régulier, pénétrant. Toujours ce roulement.
Peut-être même avais-je descendu un ou plusieurs étages, m’enfonçant sous terre. Ma sueur perlait à grosses gouttes, roulant sur mon front, rafraichissant à peine la fièvre que je sentais monter.
Ce champ n’était au final qu’un enclos à rendre fou ! Epuisé, affamé, mon ventre criant famine et ce bruit lancinant qui me filait la nausée… Je pouvais sentir la fièvre monter, la salive s’entasser, épaisse et gluante dans ma bouche. Je n’avais même pas le courage de la ravaler et peut-être finirait-elle-même pas dégouliner, me faisant baver tel un chien. Mais je n’eu pas vraiment le loisir de m’épancher sur mon sort que je fus plaqué contre un mur, une dague ou ce qui y ressemblait.
Un hoquet, et je me surpris à cracher sans retenu sur mon adversaire qui se dégagea en lançant un juron. A peine pus-je comprendre ce que l’inconnu marmonnait que je sombrais dans les ténèbres.
Je me réveillais, pâteux, un peu groggy mais surtout, poisseux. Mes cheveux étaient collants et agglutinés en petit amas compact et durs. Pouah ! J’avais du m’effondrer dans… Avec un rictus écœuré, je me relevais, observant la pièce. Rectiligne, droite, rigide et parfaitement impersonnelle. Pire encore, j’étais nu dans des draps rêches et malodorants. Je les jetais bien loin avec dédain, un geste que je regrettais aussitôt en voyant la porte s’ouvrir sur ce qui semblait être une femme. Piteusement, je ramenais mes mains entre mes jambes, elle-même remontées à la hâte contre moi pour me couvrir.
Un rictus illumina son visage, moqueuse.
« Peuh ! Ya rien à cacher ! Si tu crois que voir un Diurne le cul à l’air ça me fait quelque chose… » De son air nonchalant et agaçant, elle s’avança posant froidement le plateau à côté de moi. « Et puis, j’ai déjà tout vu. Qui t’as retiré tes guenilles à ton avis ? »
Je rougis de colère, mais ne répondit pas, la toisant avec hargne. Pour qui se prenait-elle cette Reptilienne ? A qui pensait-elle… Oh oui, peut-être valait-il mieux taire ce petit détail. A son regard, je compris bien vite qu’il n’était nul besoin de le cacher, ni même de m’en vanter. Elle savait très bien à qui elle parlait, ou du moins, à la caste globale à laquelle j’appartenais et elle n’en faisait cas.
« Manges avant de me vomir de la bile dessus une nouvelle fois. »
Silence.
J’aurais bien voulu lui répondre, mais ma gorge ne semblait trop vouloir me répondre, bien moins que mon ventre qui se fit entendre à ma place, ce qui la fit rire grassement. Honteux, je me détournais, lui montrant mon dos pour manger. C’était froid, infâme, comme manger une pâté animale. Je l’avalais néanmoins.
Après cela, elle me saisi par le bras, mes mains toujours fermement serrée sur mon entre-jambe. Autour de moi, je les voyais tous sourire, rire cacher, ils se moquaient les bougres. Elle ne me le lâcha qu’une fois dans ce qui se révéla être les douches, mixtes visiblement. D’autres Réptiliens, et quelques… Diurnes ? se lavaient savamment, badinant avant de se tourner vers moi. Quelques secondes, avant de m’ignorer complètement. Enfin pas tout à fait. Me voir courbé, recroquevillé pour me couvrir, les faisait rire. La pudeur ou l’espace personnel ici ne semblait trop leur parler.
Une main vint me taper brusquement le dos, m’arrachant un hoquet et me coupant le souffle. Un Reptilien, à la stature large et imposante était venu à ma rencontre. A comparaison, j’avais l’impression de retourner en enfance, de n’être qu’un petit garçon.
« Bin alors ! Faut pas avoir honte ! T’inqu’ètes don’ pas va, la plupart des Diurnes qu’atterrissent ici sont comme toi au début ! Tout pleutre, tout timidou de leur petite saucisse ! Ahahahahaha ! Comme si ça avait de l’importance ici ! »
Il me sourit, m’offrit une autre accolade avant de me laisser me laver. Dehors la Réptilienne, m’attendait avec des changes.
Ils étaient étranges. Au-delà de leurs mœurs libérés, ou du moins ce que je pensais l’être, ils m’accueillirent comme l’un des leurs, malgré ma race, malgré mon statut. Enfin, mon statut, seule Vallah, celle qui m’avait dénudé, le connaissait. Mais tous savait que l’hoverboard, c’était moi, et pourtant, ils n’avaient jamais vraiment cherché à savoir plus.
Je me laissais peu à peu conquérir par leurs sourires joviaux, leur voix bourrue mais tendre et cette franche camaraderie que l’esclavage n’avait fait semble-t-il qu’attiser au lieu de l’éteindre. Bien sur, des rixes éclataient souvent entre divers dominants, mais les clans semblaient s’entendre paisiblement hors de ces quelques cas. D’abord réticent et emprunt de dégout, j’étais à présent membre de leurs troupes. J’avais fini par rejoindre le clan de Vallah, dont Orvarrh était le chef. Celui-là même qui m’avait flanqué la frousse dans les douches au premier jour.
Le travail manuel dur, la chaleur, le bruit… Tout cela avait eu beau être pénible, mon corps s’était forgé, endurci, ainsi que moi-même. Je m’étais hissé, sans grande surprise, plus haut dans leur hiérarchie et celle des Diurnes dirigeants. Intelligent plus que féroce, je m’étais octroyé une place de choix, me permettant de leur offrir plus de répit en contre partie.
J’appris, quelques temps plus tard que le roi avait été renversé, sa tête suspendue et son sang étalé sur les tours, teintant le métal blanc.
Avait-il voulu me protéger en m’exilant, ou bien était-ce un simple coup du sort ? On pouvait dire que j’étais un véritable fils de pute à ce niveau.
Mais je ne m’en plains pas.
Libéré, délivré, tout comme mes camarades, nous sortîmes des mines, profitant enfin de l’air frais et du monde qui nous tendait les bras. Pour ma part, je ne regrettais nullement celui que j’avais abandonné. Je me voyais renaître à l’instar de mes compagnons.
D’un revers de manche, j’essuyais mon visage trempé de sueur. En plus de l’odeur, l’atmosphère même était lourde et oppressante. Saloperie de cambrousse ! Saloperie de machine ! Et surtout…
« Saloperie de vieux fou ! » beuglais-je comme seul au monde avant de me reprendre en pestant un coup.
L’hoverboard hors d’état, je me devais de me sortir de ce pétrin, d’éviter ces pauvres sous-évolués. Rien que les savoir si proche de moi me filait la nausée. A moins que ça ne soit l’ambiance de la mine. Le roulement, ce tintement régulier qui vrillait vos nerfs. Avant de m’écrouler, je pris à droite au premier croisement que je trouvais.
Un point de repère, je me devais d’en trouver un.
Une fois trouvé, ça ne devait pas bien être compliqué de se diriger, après tout j’avais déjà étudié diverses cartes concernant des champs de plébéiens, ça ne devait guère en déroger.
Pensais-je.
J’eus beau me diriger suivant les plans dont je me souvenais, je tournais inlassablement en rond. Ou plutôt, je me m’étais perdu comme dans un véritable labyrinthe, les marques que je m’étais laissé, complètement disparues de mon champ de vision.
Et ce roulement, léger, précis, régulier, pénétrant. Toujours ce roulement.
Peut-être même avais-je descendu un ou plusieurs étages, m’enfonçant sous terre. Ma sueur perlait à grosses gouttes, roulant sur mon front, rafraichissant à peine la fièvre que je sentais monter.
Ce champ n’était au final qu’un enclos à rendre fou ! Epuisé, affamé, mon ventre criant famine et ce bruit lancinant qui me filait la nausée… Je pouvais sentir la fièvre monter, la salive s’entasser, épaisse et gluante dans ma bouche. Je n’avais même pas le courage de la ravaler et peut-être finirait-elle-même pas dégouliner, me faisant baver tel un chien. Mais je n’eu pas vraiment le loisir de m’épancher sur mon sort que je fus plaqué contre un mur, une dague ou ce qui y ressemblait.
Un hoquet, et je me surpris à cracher sans retenu sur mon adversaire qui se dégagea en lançant un juron. A peine pus-je comprendre ce que l’inconnu marmonnait que je sombrais dans les ténèbres.
Je me réveillais, pâteux, un peu groggy mais surtout, poisseux. Mes cheveux étaient collants et agglutinés en petit amas compact et durs. Pouah ! J’avais du m’effondrer dans… Avec un rictus écœuré, je me relevais, observant la pièce. Rectiligne, droite, rigide et parfaitement impersonnelle. Pire encore, j’étais nu dans des draps rêches et malodorants. Je les jetais bien loin avec dédain, un geste que je regrettais aussitôt en voyant la porte s’ouvrir sur ce qui semblait être une femme. Piteusement, je ramenais mes mains entre mes jambes, elle-même remontées à la hâte contre moi pour me couvrir.
Un rictus illumina son visage, moqueuse.
« Peuh ! Ya rien à cacher ! Si tu crois que voir un Diurne le cul à l’air ça me fait quelque chose… » De son air nonchalant et agaçant, elle s’avança posant froidement le plateau à côté de moi. « Et puis, j’ai déjà tout vu. Qui t’as retiré tes guenilles à ton avis ? »
Je rougis de colère, mais ne répondit pas, la toisant avec hargne. Pour qui se prenait-elle cette Reptilienne ? A qui pensait-elle… Oh oui, peut-être valait-il mieux taire ce petit détail. A son regard, je compris bien vite qu’il n’était nul besoin de le cacher, ni même de m’en vanter. Elle savait très bien à qui elle parlait, ou du moins, à la caste globale à laquelle j’appartenais et elle n’en faisait cas.
« Manges avant de me vomir de la bile dessus une nouvelle fois. »
Silence.
J’aurais bien voulu lui répondre, mais ma gorge ne semblait trop vouloir me répondre, bien moins que mon ventre qui se fit entendre à ma place, ce qui la fit rire grassement. Honteux, je me détournais, lui montrant mon dos pour manger. C’était froid, infâme, comme manger une pâté animale. Je l’avalais néanmoins.
Après cela, elle me saisi par le bras, mes mains toujours fermement serrée sur mon entre-jambe. Autour de moi, je les voyais tous sourire, rire cacher, ils se moquaient les bougres. Elle ne me le lâcha qu’une fois dans ce qui se révéla être les douches, mixtes visiblement. D’autres Réptiliens, et quelques… Diurnes ? se lavaient savamment, badinant avant de se tourner vers moi. Quelques secondes, avant de m’ignorer complètement. Enfin pas tout à fait. Me voir courbé, recroquevillé pour me couvrir, les faisait rire. La pudeur ou l’espace personnel ici ne semblait trop leur parler.
Une main vint me taper brusquement le dos, m’arrachant un hoquet et me coupant le souffle. Un Reptilien, à la stature large et imposante était venu à ma rencontre. A comparaison, j’avais l’impression de retourner en enfance, de n’être qu’un petit garçon.
« Bin alors ! Faut pas avoir honte ! T’inqu’ètes don’ pas va, la plupart des Diurnes qu’atterrissent ici sont comme toi au début ! Tout pleutre, tout timidou de leur petite saucisse ! Ahahahahaha ! Comme si ça avait de l’importance ici ! »
Il me sourit, m’offrit une autre accolade avant de me laisser me laver. Dehors la Réptilienne, m’attendait avec des changes.
Ils étaient étranges. Au-delà de leurs mœurs libérés, ou du moins ce que je pensais l’être, ils m’accueillirent comme l’un des leurs, malgré ma race, malgré mon statut. Enfin, mon statut, seule Vallah, celle qui m’avait dénudé, le connaissait. Mais tous savait que l’hoverboard, c’était moi, et pourtant, ils n’avaient jamais vraiment cherché à savoir plus.
Je me laissais peu à peu conquérir par leurs sourires joviaux, leur voix bourrue mais tendre et cette franche camaraderie que l’esclavage n’avait fait semble-t-il qu’attiser au lieu de l’éteindre. Bien sur, des rixes éclataient souvent entre divers dominants, mais les clans semblaient s’entendre paisiblement hors de ces quelques cas. D’abord réticent et emprunt de dégout, j’étais à présent membre de leurs troupes. J’avais fini par rejoindre le clan de Vallah, dont Orvarrh était le chef. Celui-là même qui m’avait flanqué la frousse dans les douches au premier jour.
Le travail manuel dur, la chaleur, le bruit… Tout cela avait eu beau être pénible, mon corps s’était forgé, endurci, ainsi que moi-même. Je m’étais hissé, sans grande surprise, plus haut dans leur hiérarchie et celle des Diurnes dirigeants. Intelligent plus que féroce, je m’étais octroyé une place de choix, me permettant de leur offrir plus de répit en contre partie.
J’appris, quelques temps plus tard que le roi avait été renversé, sa tête suspendue et son sang étalé sur les tours, teintant le métal blanc.
Avait-il voulu me protéger en m’exilant, ou bien était-ce un simple coup du sort ? On pouvait dire que j’étais un véritable fils de pute à ce niveau.
Mais je ne m’en plains pas.
Libéré, délivré, tout comme mes camarades, nous sortîmes des mines, profitant enfin de l’air frais et du monde qui nous tendait les bras. Pour ma part, je ne regrettais nullement celui que j’avais abandonné. Je me voyais renaître à l’instar de mes compagnons.
Le March'Ecume - Texte de Rena
D'après une idée d'Anako
Personnage : mangouste / Défaut: peureux / Qualité : débrouillard / Lieu: toundra / Epoque : post-apocalypse.
Un bruit dans les buissons épais, une petite créature émerge des touffes d'herbe encore gelées par le vent glacial qui a balayé les lieux toute la nuit. Do regarde à l'horizon, guettant l'aube avec avidité. Il se sent si vieux, à présent. Combien de levés de l'astre doré a-t-il passé à se demander quand il atteindrait son but? Il a cessé de compter, quand il a quitté les terres où il a grandi. Il lui a semblé prendre une bonne centaine de lunes depuis.
Quand il est parti, il n'était encore qu'un jeune membre du clan Crok'Serpent. Il vivait parmi ses pairs dans une vallée de sable fin, non loin d'un lac qui leur avait été offert par les Aïeuls. Il croyait pouvoir échapper au rite, sous prétexte qu'il était plus frêle, plus fragile que les autres, qu'il voyait les Signes, dans l'eau, dans les feuilles et dans le sang. Il était persuadé d'être trop utile au clan pour avoir à subir ce douloureux exil loin des siens… Il avait peur, si peur de partir… il avait si peur de quitter son clan.
Puis il s'est mis à faire ce rêve étrange, ce rêve terrifiant, où sa vie lui était enlevée. Ce rêve où il étouffait, où il tentait de se débattre, cherchant à se soustraire à ce deux-pattes qui lui serrait le cou au fil des secondes. Mais son corps ne réagissait pas, comme s'il était résigné. Mi aussi, a eu cette vision. Elle a dit que c'était là bas, qu'il perdrait sa conscience actuelle, et qu'il s'élèverait. Qu'il verrait. Alors il serait prêt à la remplacer. Do a tout fait pour éviter ce voyage douloureux. Mais la volonté de Mi est indiscutable. Elle est son mentor. Alors Do est parti. Il a quitté les siens, le coeur lourd, chargé de larmes, et l'esprit si terrifié par ce qu'il allait rencontré.
Et il en a bravé, des dangers. Sa peur est une alarme permanente, le moindre bruit, la moindre odeur, la moindre forme le fait bondir de panique. Mais il est assez habile pour savoir décrypter chaque situation malgré cette peur, et s'en extraire avec une aisance affligeante. C'est ainsi qu'il est venu à bout de tant d'obstacles.
À présent, il est là. Dans ce lieu où jamais il ne fait chaud. Il se nourrit des rares plantes à supporter le climat glacial, à dormir dans des terriers, à pleurer l'absence des serpents et des scorpion dont il est si friand, et qu'il ne peut se mettre sous la dent… Il est sur le point de l'atteindre, son but. Après encore un regard triste vers l'endroit où le ciel commence à s'éclaircir un peu, le petit être se dirige vers le Nid. Do en a déjà entendu parler. Les vieux racontaient souvent que les deux-pattes utilisaient ces choses pour ramper sur l'eau. Ils appelaient ça des March'Ecume. Celui-ci est immense, gris, froid – au moins autant que la végétation environnante, si ce n'est plus – et tout à fait inhospitalier. Son pelage lisse est rongé par endroits, laissant voir ses entrailles. Mais celui-là… il est réellement gigantesque. Le petit coeur de Do se met à palpiter son souffle s'accélère, il commence à trembler. Ses petites pattes peuvent à peine le porter.
C'est le moment qu'il redoutait tant. Il voudrait faire demi-tour, rentrer à la tribu et faire croire que le rite est passé. Mais Mi saurait, elle. Mi comprendrait qu'il a été bien trop lâche, qu'il n'a pas la force de lui succéder. La douce voix de sa tutrice tinte à ses oreilles :
« Vas, et tu verras. »
Après s'être recroquevillé sur lui-même, espérant de toutes ses forces que cela va annuler le sort qui l'attend, il finit par s'élancer d'un bond dans le corps de la bête de métal. Derrière lui, les premiers rayons du soleil le réchauffent, et il doit déjà y renoncer pour s'engouffrer dans les ténèbres du March'Ecume. Ses griffes raclent le sol ferreux, tandis qu'il s'enfonce dans le monstre immense, se guidant uniquement à l'aide de son odorat. Et plus il avance, plus sa marche est laborieuse tant ses membres sont crispés par la terreur. Il est sur le point de céder à la peur la plus noire, quand il aperçoit une légère ondée de lumière, au loin. Mû par un espoir soudain, il accélère le pas malgré la rudesse de ses articulations. Très lentement, il se rapproche de la lumière qu'il ne voit pas encore... Il lui faut quelques instants pour se rendre compte que certains bruits qu'il entend ne sont pas les siens. Il est suivi. Son sang ne fait qu'un tour dans ses veines, et il se jette littéralement vers la source de lumière, convaincu qu'il y sera en sécurité. Sa course lui semble durer une éternité, dix éternités tant il sent sa vie prête à basculer. Derrière lui, le grattement s'est peu à peu changé en grognement puis en hurlement affamé. Do n'ose pas jeter un regard en arrière. Il a bien trop peur de découvrir ce qui cherche à le happer. Il se rue, aussi vite qu'il le peut, à travers le boyau transpirant le sang de cette chose rouillée jusqu'aux os, et la lumière se fait enfin de plus en plus dense. Il finit par arriver à sa source. L'endroit est vaste.
Do voit alors ce qui ressemble à une pierre large, au centre d'une immense grotte ronde. Flottant au-dessus de la pierre, une grande boule d'où émane une lumière si puissante qu'elle l'aveugle un instant. La stupéfaction de sa découverte cède vite la place à sa peur, quand le rugissement derrière lui finit par lui souffler la pelisse. Alors il bondit une nouvelle fois, mais parvient à éviter de justesse une frappe de son poursuivant, tout en se jetant vers la boule de lumière.
D'un coup, plus aucun bruit, plus aucun mouvement, plus aucune sensation. Do ouvre les yeux. Il est à la place de la lumière. Rien n'a changé, ou presque. Seule la chose qui le poursuivait, a changé. Elle est collée contre le mur, inerte… non, en fait… son sang est sur le mur. La chose, elle, a disparu. La chose qu'il avait vu déjà, dans ses cauchemars. Il comprend maintenant pourquoi dans ce rêve terrible, son corps ne bougeait pas tandis que le deux-pattes essayait de l'étrangler. Il comprend pourquoi Mi l'a envoyé ici, pourquoi il a dû affronter mille périls jusqu'ici, dans la toundra gelée. Il comprend aussi tout le reste, il sait tout, il voit tout.
Do sort du March'Ecume. Les rayons de l'astre doré l'accueillent et lui réchauffent le coeur. Après cette épreuve redoutable, il s'assied parmi les herbes froides, et entreprend de nettoyer sa pelisse. Auparavant, elle était brune, rayée de trois traits noirs. À présent, elle est noire de jais. Ses yeux quant à eux, sont d'un blanc immaculé. Dans sa mémoire, ce qui vient d'arriver dans le March'Ecume. Il a touché la boule de lumière puis il est tombé au sol. Le deux-pattes l'a saisi et l'a étranglé. Do s'est laissé faire. C'était un acte essentiel à l'éveil. Et quand il est mort, la Lumière s'est emparée de lui, changeant son pelag et brûlant le deux-pattes jusqu'à ce qu'il ne reste que son sang, éparpillé à travers la grotte de métal.
Do est né, une seconde fois.
Quand il est parti, il n'était encore qu'un jeune membre du clan Crok'Serpent. Il vivait parmi ses pairs dans une vallée de sable fin, non loin d'un lac qui leur avait été offert par les Aïeuls. Il croyait pouvoir échapper au rite, sous prétexte qu'il était plus frêle, plus fragile que les autres, qu'il voyait les Signes, dans l'eau, dans les feuilles et dans le sang. Il était persuadé d'être trop utile au clan pour avoir à subir ce douloureux exil loin des siens… Il avait peur, si peur de partir… il avait si peur de quitter son clan.
Puis il s'est mis à faire ce rêve étrange, ce rêve terrifiant, où sa vie lui était enlevée. Ce rêve où il étouffait, où il tentait de se débattre, cherchant à se soustraire à ce deux-pattes qui lui serrait le cou au fil des secondes. Mais son corps ne réagissait pas, comme s'il était résigné. Mi aussi, a eu cette vision. Elle a dit que c'était là bas, qu'il perdrait sa conscience actuelle, et qu'il s'élèverait. Qu'il verrait. Alors il serait prêt à la remplacer. Do a tout fait pour éviter ce voyage douloureux. Mais la volonté de Mi est indiscutable. Elle est son mentor. Alors Do est parti. Il a quitté les siens, le coeur lourd, chargé de larmes, et l'esprit si terrifié par ce qu'il allait rencontré.
Et il en a bravé, des dangers. Sa peur est une alarme permanente, le moindre bruit, la moindre odeur, la moindre forme le fait bondir de panique. Mais il est assez habile pour savoir décrypter chaque situation malgré cette peur, et s'en extraire avec une aisance affligeante. C'est ainsi qu'il est venu à bout de tant d'obstacles.
À présent, il est là. Dans ce lieu où jamais il ne fait chaud. Il se nourrit des rares plantes à supporter le climat glacial, à dormir dans des terriers, à pleurer l'absence des serpents et des scorpion dont il est si friand, et qu'il ne peut se mettre sous la dent… Il est sur le point de l'atteindre, son but. Après encore un regard triste vers l'endroit où le ciel commence à s'éclaircir un peu, le petit être se dirige vers le Nid. Do en a déjà entendu parler. Les vieux racontaient souvent que les deux-pattes utilisaient ces choses pour ramper sur l'eau. Ils appelaient ça des March'Ecume. Celui-ci est immense, gris, froid – au moins autant que la végétation environnante, si ce n'est plus – et tout à fait inhospitalier. Son pelage lisse est rongé par endroits, laissant voir ses entrailles. Mais celui-là… il est réellement gigantesque. Le petit coeur de Do se met à palpiter son souffle s'accélère, il commence à trembler. Ses petites pattes peuvent à peine le porter.
C'est le moment qu'il redoutait tant. Il voudrait faire demi-tour, rentrer à la tribu et faire croire que le rite est passé. Mais Mi saurait, elle. Mi comprendrait qu'il a été bien trop lâche, qu'il n'a pas la force de lui succéder. La douce voix de sa tutrice tinte à ses oreilles :
« Vas, et tu verras. »
Après s'être recroquevillé sur lui-même, espérant de toutes ses forces que cela va annuler le sort qui l'attend, il finit par s'élancer d'un bond dans le corps de la bête de métal. Derrière lui, les premiers rayons du soleil le réchauffent, et il doit déjà y renoncer pour s'engouffrer dans les ténèbres du March'Ecume. Ses griffes raclent le sol ferreux, tandis qu'il s'enfonce dans le monstre immense, se guidant uniquement à l'aide de son odorat. Et plus il avance, plus sa marche est laborieuse tant ses membres sont crispés par la terreur. Il est sur le point de céder à la peur la plus noire, quand il aperçoit une légère ondée de lumière, au loin. Mû par un espoir soudain, il accélère le pas malgré la rudesse de ses articulations. Très lentement, il se rapproche de la lumière qu'il ne voit pas encore... Il lui faut quelques instants pour se rendre compte que certains bruits qu'il entend ne sont pas les siens. Il est suivi. Son sang ne fait qu'un tour dans ses veines, et il se jette littéralement vers la source de lumière, convaincu qu'il y sera en sécurité. Sa course lui semble durer une éternité, dix éternités tant il sent sa vie prête à basculer. Derrière lui, le grattement s'est peu à peu changé en grognement puis en hurlement affamé. Do n'ose pas jeter un regard en arrière. Il a bien trop peur de découvrir ce qui cherche à le happer. Il se rue, aussi vite qu'il le peut, à travers le boyau transpirant le sang de cette chose rouillée jusqu'aux os, et la lumière se fait enfin de plus en plus dense. Il finit par arriver à sa source. L'endroit est vaste.
Do voit alors ce qui ressemble à une pierre large, au centre d'une immense grotte ronde. Flottant au-dessus de la pierre, une grande boule d'où émane une lumière si puissante qu'elle l'aveugle un instant. La stupéfaction de sa découverte cède vite la place à sa peur, quand le rugissement derrière lui finit par lui souffler la pelisse. Alors il bondit une nouvelle fois, mais parvient à éviter de justesse une frappe de son poursuivant, tout en se jetant vers la boule de lumière.
D'un coup, plus aucun bruit, plus aucun mouvement, plus aucune sensation. Do ouvre les yeux. Il est à la place de la lumière. Rien n'a changé, ou presque. Seule la chose qui le poursuivait, a changé. Elle est collée contre le mur, inerte… non, en fait… son sang est sur le mur. La chose, elle, a disparu. La chose qu'il avait vu déjà, dans ses cauchemars. Il comprend maintenant pourquoi dans ce rêve terrible, son corps ne bougeait pas tandis que le deux-pattes essayait de l'étrangler. Il comprend pourquoi Mi l'a envoyé ici, pourquoi il a dû affronter mille périls jusqu'ici, dans la toundra gelée. Il comprend aussi tout le reste, il sait tout, il voit tout.
Do sort du March'Ecume. Les rayons de l'astre doré l'accueillent et lui réchauffent le coeur. Après cette épreuve redoutable, il s'assied parmi les herbes froides, et entreprend de nettoyer sa pelisse. Auparavant, elle était brune, rayée de trois traits noirs. À présent, elle est noire de jais. Ses yeux quant à eux, sont d'un blanc immaculé. Dans sa mémoire, ce qui vient d'arriver dans le March'Ecume. Il a touché la boule de lumière puis il est tombé au sol. Le deux-pattes l'a saisi et l'a étranglé. Do s'est laissé faire. C'était un acte essentiel à l'éveil. Et quand il est mort, la Lumière s'est emparée de lui, changeant son pelag et brûlant le deux-pattes jusqu'à ce qu'il ne reste que son sang, éparpillé à travers la grotte de métal.
Do est né, une seconde fois.